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LA TROISIÈME ESPÈCE
Chapitre 28
KERGUELEN

(pour mes lectrices et lecteurs : je viens de faire une relecture... et j'ai des excuses à vous présenter... des fautes innommables restaient... je les aies évidemment corrigées... j'ai aussi modifié légèrement le chapitre 14, pour y inclure une description littéraire du Lockheed constellation — Merci de votre attention)

Dans la cabane de Tehurua, quand les membres de la petite compagnie ont vu et tenu en main le fameux livre, un silence presque religieux s’est fait entendre.
C’est Einar qui a repris la parole en redonnant l’ouvrage aux feuilles de métal fin à son conservateur.
— C’est un choc déjà de savoir qu’une telle chose existe, mais l’avoir en main est encore plus perturbant, dit-il la voix cassée.
— J’en suis bien conscient. D’autant que cet ouvrage ne plaît pas à tout le monde, précise Tehurua.
Le regard d’Édouard, le premier, se plisse.
— Comment ça ?
— On a déjà voulu attenter à ma vie, monsieur.
— Puis-je... peut-on en savoir plus ?
— Oui, c’était en 1948, à Auckland, j’étais professeur de paléontologie et paléontographie à l’Université d’Auckland, c’est là que j’ai connu Llewellyn. Et des individus, avant que de vouloir m’abattre, m’ont d’abord proposé une somme exorbitante pour m’acheter ce livre, disant qu’ils représentaient un riche propriétaire qui désirait rester anonyme.
Les regards que s’échangent ses invités lui indiquent qu’ils comprennent.
— Vous sauriez qui c’était ? demande Tehurua.
Einar, essayant de garder son calme, répond à voix basse, comme si quelqu’un à l’extérieur aurait pu entendre.
— Peut-être... John Smith, ça vous dit quelque chose ?
Le regard du vieux chaman se fige.
— Mais bien sûr ! C’est le nom du pasteur de Llewellyn et c’était aussi l’un de mes élèves... quand j’étais à Oxford avant la Première Guerre mondiale.
Théo a la bouche ouverte et les yeux qui pétillent.
— Vous y étiez professeur ?
— Bien sûr ! J’avais plus de quarante ans en 1914, je n’étais plus étudiant !
Théo se secoue la tête comme pour se sortir une idée de la tête.
— Bien sûr, bien sûr... quand j’étais jeune étudiant, moi-même à Oxford... soudainement, je me souviens de vous maintenant. 1913 !... Thierry Athur !
C’est Tehurua cette fois qui reste bouche bée.
— Alors ça !
Einar se lève d’un coup.
— Bon, messieurs, vous vous souviendrez des vieux jours plus tard... il est temps de “tous” partir d’ici.
L’ancien Thierry Athur et Théo Dewez se regardent comme s’ils se retrouvaient après un très long voyage. Mais Einar ayant appuyé sur le “tous”, Tehurua comprend qu’il est inclus d’office.
— J’ai l’impression que je dois vous suivre, mon ami, dit-il, décidé.
— Les esprits ? demande Samy d’un regard curieux.
— Non, sourit Tehurua... la logique même, mais les esprits sont toujours logiques aussi.
Un rire commun accompagne leur départ de la masure.

Sur le quai du port, la petite troupe revenant des hauteurs de Saint-Denis s’approche de la navette qui les attend.
Le second, Nikos Panagiotou, se lève et leur tend les bras, tout heureux de les revoir arriver en cette fin de matinée.
Soudainement une rafale de coups de feu balaie la jetée, tuant sur le coup le pauvre second et blessant Réginald. Édouard, lui, se jette sur Tehurua et son trésor pour le protéger tout en sortant son Colt 45.
Einar lui crie.
— Là... dans la ruelle en face.
— Vu !
Il tire deux balles avant qu’une silhouette ne sorte du coin d’un hangar au bord du quai et, touchée, tombe à l’eau comme une pierre.
— Il a eu son compte, lance Édouard en se relevant tout en aidant aussi son “client principal”.

À leur arrivée sur le navire, les trois gros bras, envoyés par Howard, ont l’air penauds quand Einar les voit dans le salon, entourés de bouteilles diverses.
— Vous faites bien de vous taire, messieurs ! Ce n’est pas à l’honneur de vos curriculums ! Alors que nous avons échappé à un tueur que vous auriez bien pu dissuader par votre présence. Vous êtes virés. Je ne vous retiens pas...
Il sort une liasse de billets.
— ...Voici pour votre “service”. On vous débarque dès que nous serons de retour à terre.
Amar s’approche du “boss”, encore plus embêté que les autres.
— Boss, c’est moi le responsable. Je n’avais jamais vu une cave aussi bien... fournie. Et c’est moi qui nous ai poussés à goûter toutes ces bouteilles.
D’un geste du bras il survole les cadavres vides.
— C’est une tournée dont j’espère que vous vous rappellerez.
— Vous n’en parlerez pas à monsieur Hughes ?
— Non... je suis déçu, mais pas méchant. Bon, je vous laisse, je vais voir notre ami Réginald qui n’est heureusement que légèrement blessé.
Édouard, qui était resté dans le couloir, secoue négativement la tête.
— Tssss Tssss, le vin ça gâche le professionnel.

Quelques heures plus tard, alors que le yacht file sur l’eau assez calme pour la saison.
— Monsieur Hallqvist ! appelle le commandant.
Einar était sur le pont en train d’admirer l’océan après ce déjeuner au grand air.
— Nous sommes non loin de l’île principale des Kerguelen. Que faut-il faire ? Mouiller ou se diriger ailleurs ? Heard et McDonald ?
— Seconde solution, commandant. Je vous laisse, nous allons tous écouter monsieur Tehurua qui va nous lire enfin le livre que nous avons rapporté.

Dans le salon nettoyé par les trois soulards, Tehurua, entouré de tous, ouvre le livre.
— J’ai besoin de mes lunettes, dit-il en cherchant dans ses poches.
Il n’arrive pas à les trouver. Il se relève, perdant très légèrement l’équilibre. Il pose sa main sur les coussins de la banquette pour se retenir, mais elle glisse entre deux. Quand il la retire, il saigne un peu.
Einar est le premier à réagir.
— Ah ! Je suis bête, elles sont là dans ma poche de chemise.
Voyant le bout des doigts ensanglantés, Einar s’inquiète.
— Que s’est-il passé ?
— Rien, rien, un morceau de verre brisé... regardez. Ce n’est rien.
— Je vais chercher un pansement, décide Samy en se levant.
Pendant ce temps, Tehurua soulève la couverture métallique du gros livre.
— Regardez ! crie Théo.
Alors qu’il était en train de commencer à déchiffrer mentalement le texte qu’il allait leur lire, Théo pointe un endroit sur le verso de la couverture.
En effet, un dessin apparaît fugacement, une série de tracés fins, comme gravés de l’intérieur.
Tout le monde regarde ce qui est manifestement un plan et une suite de chiffres.
— C’est extraordinaire, ça fait plus de soixante ans que j’ai cet ouvrage, et une seule goutte de mon sang vient de révéler ce que personne n’a pu voir depuis...
Tehurua a l’air complètement héberlué.
— ...Plusieurs millions d’années, conclut Einar. J’ai noté les chiffres... -51.175 71.3333.

(chapitre 29... avant-dernier chapitre, samedi 22 novembre 2025 “Sud de l'ex Gondwana”)